lundi 3 décembre 2007

"retour sur la guerre civile algérienne 1991-1998"


Depuis 1991, l'Algérie a connu une vague de violence, qui a dégénérée, jusqu’en 1998, en une guerre civile.

Ce conflit opposait et oppose encore, dans une certaine mesure, le régime soutenu par les militaires à un complexe réseau d'opposition clandestine, d’abord sous l'égide du Front Islamique du Salut.

Il a été déclenché par le « coup d'Etat » orchestré par l'armée qui avait pour but de bloquer la victoire du FIS aux élections législatives de décembre 1991.

Selon les chiffres les plus communément admis par la presse et la communauté internationale, plus 100.000 personnes ont été tuées au cours de cette période, soit 1200 morts par mois.

En avril 1999, une page a été tournée avec l'élection à la présidence d'Abdelaziz Bouteflika, candidat des militaires et ministre des affaires étrangères de Boumediène.

Cette élection a suscité de grands espoirs et a fait reculer la violence : Le président a en effet rapidement décrété une amnistie limitée pour les responsables de la violence : la loi sur la concorde civile, et a promis de mettre en œuvre des réformes fondamentales visant à mettre un terme à la violente crise qui secoue le pays depuis 1992.

Cependant si la violence armée est résiduelle, la crise n’est pas finie et la problématique reste plus complexe : dans un environnement marqué par la violence et la corruption, l’inégalité de conditions vécue au quotidien, entraînent la coupure entre les privilégiés et les catégories exclues qui, en l’absence de relais politiques, finissent en partie par envisager la violence comme recours « légitime ».

Cette propension, nourrie par la misère, l’arbitraire et la défaillance du système éducatif, est observée surtout au sein des catégories les plus jeunes, 50 % de la population a moins de 19 ans, peu enclin à accepter une idéologie officielle exclusivement fondée sur la légitimation par l’histoire.

Dans les années 1980, déjà, la poussée démographique accélére l’obsolescence idéologique et la fragmentation dans les milieux qui se réclament encore de l’héritage historique de la guerre de libération è Une minorité exerce le pouvoir, l’influence et le sert aux niveaux élevés de la hiérarchie qui vit de plus en plus dans des ghettos luxueux, s’enrichit de prélèvements occultes et de détournements de biens publics.

Les instruments de sa protection sont la force armée, le contrôle policier et celui des appareils judicaires et administratifs subordonnés. Les autres, le plus grand nombre se dissolvent progressivement dans les masses de la pauvreté, en dépit des faibles avantages qu’ils conservent.

Le prosélytisme islamisme a achevé, dans sa phase d’expansion de faire s’écrouler les discours de mythe patriotique dominant en reprenant à son compte les revendications de l’égalité de condition et de fin de la gestion discrétionnaire de la société è Ainsi, c'est en 1982 que le mouvement islamique se manifeste en tant que tel par deux événements : la grande manifestation étudiante à la faculté centrale d'Alger qui oppose les étudiants de gauche francophones aux étudiants arabisants et islamistes + la création du Mouvement islamiste armé (MIA) par Mustapha Bouyali qui, récupérant « l'imaginaire du maquis et de l'insurrection contre la France en lui donnant une signification islamiste » implante les premiers groupes armés (Keppel, 1994).

Peu à peu, cette mouvance islamiste va s'étendre, capitalisant tout un travail caritatif mené par les associations islamiques de la base qui prenaient en charge problèmes quotidiens des Algériens, palliant la carence de l'Etat et réorganisant la société autour de mosquées qui dispensaient biens et services.

Elle s'appuie aussi sur une rhétorique, celle d'une France cause de tous les malheurs du pays. Le FIS à partir de 1989, date de sa création, veut mettre un terme au métissage culturel de l'Algérie. Pour cela, il faut diaboliser la France et ceux qui ont perpétués sa présence à travers un FLN laïque, socialisant et francophone.

Le monde méditerranéen a assisté aussi à la montée de l'islamisme ; maîtrisé dans des pays comme l'Egypte, la Turquie ou le Maroc, il a dérapé en Algérie (Lacoste, 1996).

Donc, si la problématique s'exprime simplement, sa manifestation sur le terrain est infiniment plus complexe.

Certains ont pu se demander si les émirs remplacent les colonels ? La religion est-elle une couverture pour l'appropriation par la guerre du pouvoir et de la richesse économique (Martinez, 1998).

En tout cas, avec la multiplication des acteurs impliqués dans le maintien de l’ordre, milices locales et organisations paramilitaires notamment, en plus des différents groupes armés, le champs des intérêts se fragmente et la société se militarise. Est-ce que cela a été uniformément sur tout le territoire algérien ?

Nous verrons à ce sujet, le cas de Blida, dans la plaine de la Mitidja et l’Algérois ==> ces espaces furent, en effet, le théâtre de nombreux meurtres, notamment depuis l’entrée en lisse des GIA depuis 1993.

La situation fut à son paroxysme lors des années 1996/1997 avec de nombreux massacres dans les environs de Blida.

Car si il y un constat global de l’insécurité en Algérie, des causes au maintien de la violence ou à sa supériorité sur certains territoires viennent de facteurs locaux spécifiques (Salgon, 1999). Et si ce conflit est de basse intensité, la région centre de l’Algérie fut la plus touchée et notamment la plaine de la Mitidja. De même J-M Salgon, dans son ouvrage violences ambiguës (Salgon, 1999) propose une typologie des maquis: celui de Chréa est stable et compose avec celui de Larbaa, de Bouinan et Souma le tristement célèbre « triangle de la mort » en joignant Alger.

Or ce qui est problématique c’est que normalement la guérilla se développe le plus souvent dans des régions excentrées, propices à une action clandestine (Soppelsa, 1987), et que la ville de Blida se trouve à une cinquantaine de kilomètres d’Alger et dans une situation de carrefour, de surcroît dans la première région militaire du pays. Par ailleurs, c’est à Sidi El Kebir (Blida) que fut perpétré un des premiers massacres collectif de la guerre civile en 1996 (35 morts).

Une tentative d’éclaircissement de la situation semble donc bienvenue : il serait opportun de s’interroger sur le profil géopolitique de ces ville, de se demander qui intervient sur ce territoire et pour quelles raisons, et de savoir quel est le rôle de l’histoire et des représentations ?


1. Caractéristiques et causes de la crise



· Caractéristiques de la crise / synthèse des mouvements islamiques


· Causes de la crise


· Une courte analyse de l’espace algérien


· Conclusion : les paradoxes de la guerre civile



2. Des rivalités de pouvoir sur des territoires


· Le symbole et l’intérêt d’Alger


· Blida un site et une situation exceptionnelles


· Evolution stratégique des villes de Blida et alger


· Conclusion : Un urbanisme et une géographie du terrorisme



3. Les représentations des acteurs


· Le pouvoir: la logique du sytème


· Le peuple : l’armée décridibilisée



· Les islamistes : divergent sur les modalités d’action (not. Le rôle de la société) mais non le diagnostique


· La communauté internationale : une affaire algéro-algérienne


· Conclusion: des representations antagonistes ==> la bataille du souvenir de la guerre de libération


4. Conclusion


· 1994 et le tournant de la guerre: FMI, éradicateurs et GIAs


· Une géographie régionale et urbaine du terrorisme: “la géographie ça sert d’abord à faire la guerre” (Lacoste, 1976)


· Frontières mentales: replis de l’espace sur soi, à toutes les échelles


· Le retour de la violence légitime (et historique) et du monopole de la lecture de l’histoire


· Des réformes économiques discrètes


· Un fond incompressible de violence? Une mutation du mode opératoire et des revendications: du GSPC à Al Quaida Maghreb


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